Billroth II

Dans une reconstruction de Billroth II après une gastrectomie partielle, le moignon duodénal est fermé et une gastrojéjunostomie est créée (voir Fig. 12.2B). Ce type de reconstruction est généralement utilisé en cas d’ulcère gastroduodénal compliqué ou de carcinome antral gastrique localisé nécessitant une résection étendue. L’estomac restant est de longueur variable et peut permettre une manœuvre de rétroflexion s’il reste un estomac résiduel adéquat. Le résidu gastrique contient généralement de la bile mousseuse et un érythème muqueux dû au reflux alcalin.32 La gastrojéjunostomie est située à l’extrémité distale de l’estomac où l’on peut identifier deux ouvertures stomales correspondant à une anastomose de bout en bout (voir Fig. 12.2C).

Il existe plusieurs variantes de technique chirurgicale pour réaliser la gastrojéjunostomie, chacune ayant un aspect endoscopique distinct. La technique choisie dépend de la préférence du chirurgien, et il n’existe pas d’approche uniforme. La gastrojéjunostomie peut varier en fonction de la taille de l’anastomose, de l’orientation de l’anse jéjunale par rapport à l’estomac et de la position de l’anastomose par rapport au côlon transverse. Si toute la longueur de l’estomac sectionné est anastomosée au jéjunum (oralis totalis ou Polya), on observe plusieurs rangées de plis jéjunaux entre les deux ouvertures stomales (Fig. 12.3A). A l’inverse, si seul un segment de l’estomac sectionné est anastomosé au jéjunum (oralis partialis ou Hoffmeister), peu ou pas de plis sont visibles. Dans ce cas, l’estomac est partiellement fermé à partir de la petite courbure pour réduire le diamètre de l’anastomose, qui est située vers la grande courbure. On peut voir un pli proéminent émanant de la petite courbure vers l’anastomose. Certains chirurgiens attachent le membre jéjunal à la ligne de suture qui ferme l’estomac afin d’éviter une déhiscence lors de la réalisation d’une anastomose oralis partialis (voir Fig. 12.3B).33 Dans ce cas, une angulation importante peut être négociée pour entrer dans le membre jéjunal correspondant. Le petit diamètre de l’anastomose associé à l’angulation aiguë de ce type de reconstruction peut rendre l’anatomie difficile à définir par voie endoscopique.

Dans certains cas, l’estomac est complètement fermé à son extrémité distale et l’anastomose gastrojéjunale est réalisée à l’aide d’une agrafeuse linéaire ou circulaire de manière latérale au niveau de la paroi postérieure, 2 cm proximalement à l’extrémité de l’estomac.34 Cependant, lors de l’observation endoscopique, cette anastomose côte à côte est presque impossible à distinguer d’une courte anastomose bout à bout. Le jéjunum peut être anastomosé à l’estomac avec la branche afférente attachée à la grande courbure (isopéristaltique) ou à la petite courbure (antipéristaltique). Le membre afférent désigne le membre jéjunal qui est en continuité avec le duodénum, tandis que le membre efférent désigne celui qui quitte l’estomac vers le jéjunum distal. Les deux ouvertures stomales observées par endoscopie peuvent représenter le membre afférent ou efférent selon la façon dont la reconstruction a été réalisée (voir Fig. 12.3C et D). Si la reconstruction est isopéristaltique, l’ouverture liée à la plus grande courbure correspond au membre afférent. Si la reconstruction est antipéristaltique, l’ouverture liée à la plus grande courbure correspond au membre efférent. Habituellement, l’ouverture stomale liée à la petite courbure est plus difficile d’accès avec l’endoscope en raison de l’approche relativement tangentielle de l’endoscope à l’anastomose (voir Fig. 12.3E).35

Les gastrectomies incluent généralement la petite courbure plus que la grande courbure dans la résection. De plus, les informations provenant des notes chirurgicales sur le type de reconstruction, le péristaltisme et le flux biliaire pourraient aider à définir les membres par voie endoscopique. En observant attentivement l’anastomose, on peut voir que la bile provient principalement du membre afférent. L’introduction de l’endoscope par cette ouverture devrait révéler un volume croissant de bile à mesure que l’endoscope avance vers le bulbe, bien que la bile puisse également être observée dans le membre efférent. Des ondes péristaltiques visibles s’éloignant de l’endoscope suggèrent que l’instrument se trouve dans le membre efférent. Lorsque le moignon duodénal est atteint, la muqueuse plate du bulbe résiduel avec une déformation cicatricielle en cul-de-sac peut être identifiée. Un retrait prudent de l’endoscope expose la papille majeure, généralement située au quadrant supérieur droit à la radiographie (voir Fig. 12.3F).

Chez les patients présentant une anatomie de Billroth II, la papille est tournée de 180 degrés dans le champ visuel endoscopique. Cette position  » à l’envers  » nécessite des techniques distinctes pour réaliser une cholangiopancréatographie rétrograde endoscopique (CPRE), notamment des sphinctérotomes dédiés, une technique de coupe à l’aiguille sur l’endoprothèse, ou une dilatation par ballonnet de la papille.36-40 Si le moignon duodénal ne peut être identifié, l’endoscope doit être retiré et l’autre membre doit être intubé autant que possible. La visualisation fluoroscopique peut indiquer que le membre efférent a été pénétré lorsqu’on voit l’instrument passer profondément dans le bassin. A l’inverse, le passage de l’endoscope dans le quadrant supérieur droit vers le foie ou des clips de cholécystectomie antérieurs suggère une entrée dans le membre afférent.41

La longueur du membre afférent varie également en fonction de la technique chirurgicale. Le membre afférent, fixé naturellement au niveau du ligament de Treitz et fixé chirurgicalement à l’estomac, doit être sans tension mais non redondant. Il existe deux façons de positionner le membre afférent par rapport au côlon transverse lors d’une reconstruction de Billroth II. Si une anastomose antécolique est réalisée, la gastrojéjunostomie est placée en avant du côlon transverse (voir Fig. 12.3G). Les reconstructions antécoliques présentent fréquemment de longs membres afférents en raison de la distance entre le ligament de Treitz et l’estomac restant, en passant par le mésocôlon, l’épiploon et le côlon transverse. A l’inverse, les reconstructions rétrocoliques sont réalisées par une ouverture dans le mésocôlon transverse, ce qui raccourcit la distance entre le ligament de Treitz et l’estomac restant (voir Fig. 12.3H).42,43 Les anastomoses antécoliques et rétrocoliques sont similaires sur le plan endoscopique, sauf pour la longueur des membres. La prudence est de mise si une gastrostomie endoscopique percutanée est indiquée pour un patient ayant déjà subi une gastrectomie partielle et une reconstruction rétrocolique.

La reconstruction de Billroth II peut être créée sous forme de jéjunojéjunostomie latérale, appelée procédure de Braun (Fig. 12.4A).44 Cette variante entraîne une anastomose entre le membre afférent et le membre efférent afin de détourner la bile du reliquat gastrique et de libérer la pression du membre afférent, ce qui est censé prévenir la fistule du moignon duodénal45. L’anastomose de Braun est réalisée 10 à 15 cm distalement par rapport à la gastrojéjunostomie et nécessite un membre afférent plus long pour s’adapter à la jéjunojéjunostomie.46 Endoscopiquement, la gastrojunostomie est similaire à une Billroth II standard. De la bile mousseuse est présente dans l’estomac car la procédure de Braun ne détourne que partiellement les fluides biliopancréatiques de la gastrojéjunostomie. Après avoir avancé l’endoscope à travers l’une ou l’autre des ouvertures de la gastrojéjunostomie, l’anastomose de Braun latérale peut être trouvée dans la branche afférente et efférente, et trois ouvertures peuvent être identifiées (voir Fig. 12.4B). L’une mène au jéjunum distal, une autre mène au membre afférent, et la troisième ramène à l’estomac. Une intubation inverse complète de l’estomac peut être réalisée à travers la boucle créée par l’anastomose de Braun. Les mêmes repères anatomiques décrits pour les autres procédures de Billroth II sont utiles pour diriger l’endoscope dans les membres. Cependant, une approche par essais et erreurs peut être finalement nécessaire pour atteindre le moignon duodénal.

Un taux plus élevé de perforations a été rapporté pendant la CPRE lors de la traversée du membre afférent par rapport à la CPRE standard, en particulier lorsqu’un duodénoscope thérapeutique rigide est utilisé.47,48 La procédure de Braun a également été associée à des perforations pendant la CPRE. L’utilisation d’un endoscope à vision frontale chez ces patients peut réduire le risque de perforations jéjunales.49 La possibilité d’utiliser un élévateur de duodénoscope peut augmenter le succès de la procédure, et un duodénoscope diagnostique flexible peut être plus sûr qu’un instrument thérapeutique rigide. Si la papille ne peut pas être localisée avec un endoscope à vision latérale, l’endoscope à vision avant utilisé doit être soit un coloscope pédiatrique, soit l’une des technologies d’intubation profonde de l’intestin grêle, comme les endoscopes à simple ou double ballonnet, afin de maximiser les chances d’atteindre la papille.

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