DISCUSSION
Alors que les résultats cliniques pour l’évaluation de l’amélioration symptomatique de l’arthrose du membre inférieur (c’est-à-dire l’indice des universités de Western Ontario et McMaster, l’indice algo-fonctionnel de Lequesne, etc.) sont bien établis, il existe toujours un débat sur la manière la plus appropriée d’évaluer un médicament visant à réduire, retarder ou prévenir la progression structurelle de l’arthrose. Il existe un large consensus sur le fait que l’incidence de la chirurgie des membres inférieurs est le résultat clinique le plus pertinent, mais pour des raisons pratiques, l’évaluation de ce point final particulier nécessiterait des études impliquant des cohortes massives de patients sur plusieurs années.6 En outre, le processus de décision pour une chirurgie liée à l’arthrose peut être affecté par diverses conditions non médicales, y compris le sexe, la race et le statut socio-économique.13 En fait, il n’existe pas de directives largement acceptées définissant le profil exact d’un patient subissant une chirurgie liée à l’arthrose.14 Tous ces éléments rendent la conception d’un essai clinique visant à évaluer un agent modificateur de structure potentiel dans l’arthrose sur la base de l’incidence de la chirurgie de l’arthrose des membres inférieurs au moins hasardeuse, et en tout cas impraticable.
Il existe désormais un consensus au sein des organisations scientifiques et des autorités réglementaires pour utiliser les changements radiographiques – c’est-à-dire la JSN sur une période de deux à trois ans – comme substitut d’un critère d’évaluation clinique dur2,3,6. Cependant, à ce jour, aucune étude clinique prospective à long terme n’a confirmé sans équivoque le caractère substitutif de la JSN au niveau du genou pour la chirurgie des membres inférieurs. Pour être pleinement validé, un point final de substitution doit présenter une évolution naturelle étroitement liée à celle du point final pertinent (ainsi, une diminution de la JSN serait liée à une augmentation de l’incidence de la chirurgie articulaire). L’ampleur de la modification du substitut responsable d’une augmentation ou d’une diminution subséquente du point final doit être clairement définie (par exemple, une diminution de 0,5 mm de la PJS serait liée à une multiplication par deux du risque de chirurgie articulaire). Enfin, cette relation numérique devrait également être validée à la suite d’une intervention externe, telle qu’une réduction de 50 % de la JSN entraînant une diminution de 25 % de l’incidence de la chirurgie articulaire. Dans la présente étude, nous montrons pour la première fois à partir d’une étude prospective à long terme que l’évaluation de la JSN minimale remplit les deux premières exigences de la validation de ce point final de substitution particulier.
Des études antérieures ont suggéré qu’un seuil de 0,5 mm de JSN à la hanche serait une valeur seuil appropriée, principalement parce que cette valeur correspondait à la plus petite différence entre deux mesures de JSW qui dépassait l’erreur de mesure15,16. Une diminution de 0,2 mm et 0,4 mm de la JSW de la hanche après un ou deux ans a également été associée de manière significative à un risque accru de nouvelle arthroplastie de la hanche après cinq ans, avec des fourchettes correspondantes de sensibilité et de spécificité de 68-75% et 67-78%, respectivement.17 Les chiffres rapportés dans la présente étude pour une JSN minimale du genou entre 0,5 et 0,8 mm après trois ans (efficacité globale entre 73% et 75% pour prédire la survenue d’une chirurgie du genou cinq ans plus tard) se comparent favorablement à ces résultats. Sur une base individuelle, les valeurs prédictives négatives des seuils que nous suggérons (c’est-à-dire la probabilité d’une intervention chirurgicale chez un patient dont la JSN est inférieure à la valeur seuil) sont élevées (92-94%), mais les valeurs prédictives positives (la probabilité d’une intervention chirurgicale chez un patient dont la JSN est supérieure à la valeur seuil) restent marginales (25-30%). Si l’on considère uniquement l’arthroplastie totale du genou, les valeurs prédictives négatives et positives des seuils que nous suggérons sont respectivement de 94-95% et de 13-18%. Ainsi, nos résultats soulignent à nouveau le fait que les considérations cliniques peuvent être plus importantes que les caractéristiques radiologiques dans le processus de discussion pour subir une chirurgie.
Nous fournissons également, pour la première fois, une comparaison tête à tête de la valeur respective de l’évaluation moyenne et minimale de JSN comme prédicteur du risque de chirurgie future du genou. Alors que les valeurs seuil de la JSN minimale entre 0,5 et 0,8 mm après trois ans sont toutes liées à une augmentation de quatre à cinq fois du risque de future chirurgie du genou (p = 0,003 à 0,004), aucun des seuils sélectionnés de la JSN moyenne (0,2 à 0,8 mm) n’était significativement lié au résultat clinique (valeurs p entre 0,09 et 0,49). Nous n’avons pas d’explication précise pour un tel résultat. Il a été rapporté précédemment que bien que la largeur minimale de l’interligne articulaire puisse être plus sensible pour identifier les changements dans le cartilage que la largeur moyenne de l’interligne articulaire, cette dernière est moins sensible à l’influence des variations dans les procédures radiographiques et le positionnement du patient. Récemment, le taux de perte de cartilage tibial sur deux ans – évalué par imagerie par résonance magnétique – s’est avéré être un prédicteur indépendant du remplacement du genou à quatre ans.18 Nous suggérons que les changements de la largeur minimale de l’interligne articulaire sont significativement corrélés aux changements de volume du cartilage tibial. Cependant, d’autres études sont nécessaires pour confirmer ces résultats particuliers.
Nous montrons également dans la présente étude que, même si d’autres vues radiographiques de l’articulation du genou pourraient être plus appropriées aujourd’hui que l’approche en extension complète, cette vue particulière reste d’un intérêt significatif car les changements radiographiques observés avec cette technique après trois ans sont significativement prédictifs d’une future chirurgie du genou.
Conclusions
Nous concluons que, sur la base d’une cohorte de patients initialement suivis pendant trois ans dans le cadre d’un essai contrôlé randomisé pour lequel des radiographies standardisées et analysées numériquement de l’articulation du signal étaient disponibles, la JSN minimale est hautement prédictive du risque de subir une chirurgie articulaire liée à l’arthrose au cours des cinq années suivantes. Ces données constituent un élément de preuve dans le processus de validation de l’évaluation de la JSN minimale en tant que substitut d’un point final clinique dur dans l’arthrose du genou.