DISCUSSION

L’approche diagnostique recommandée chez le patient adulte atteint de pharyngite se concentre sur la possibilité de streptocoques bêta-hémolytiques du groupe A. Les directives actuelles considèrent le streptocoque bêta-hémolytique du groupe A comme la seule raison d’un traitement antibiotique.2,3 Ces directives se concentrent sur la limitation de l’utilisation des antibiotiques dans les pharyngites virales probables. Bien que ces deux lignes directrices les plus récentes présentent de légers désaccords, elles seraient toutes deux d’accord pour ne pas administrer d’antibiotique aux patients dont le test rapide est négatif.

Ces lignes directrices se concentrent sur la présentation aiguë initiale de la pharyngite de l’adulte. Notre patient représente un dilemme diagnostique différent. Quelles étiologies devons-nous envisager chez un patient adulte à test rapide négatif présentant une pharyngite qui s’aggrave ?

Nous devons reconnaître que les tests de détection rapide de l’antigène ont une sensibilité imparfaite. La plupart des études font état d’une sensibilité comprise entre 80 % et 90 %.4 Ainsi, certains patients dont les tests rapides sont négatifs et dont les symptômes s’aggravent auront tout de même une pharyngite à streptocoques bêta-hémolytiques du groupe A.

Nous devons envisager au moins 5 autres possibilités importantes chez les patients qui présentent un test rapide de streptocoque négatif et une pharyngite qui s’aggrave : la mononucléose infectieuse, l’infection aiguë par le VIH, la pharyngite streptococcique bêta-hémolytique non liée au groupe A (en particulier la pharyngite streptococcique bêta-hémolytique du groupe C ou du groupe G), l’abcès péri-amygdalien et le syndrome de Lemierre (Fusobacterium necrophorum). Les patients présentant chacun de ces diagnostics auront des tests rapides de streptocoque négatifs et pourront éventuellement s’aggraver au cours de la première semaine de symptômes.

Notre patient a subi des tests appropriés pour la mononucléose infectieuse. Son test monospot négatif rendait ce diagnostic très peu probable. Bien que la mononucléose infectieuse puisse se présenter avec des symptômes persistants, l’aggravation de ses symptômes de gorge rendait ce diagnostic moins probable.

Elle n’a admis aucun facteur de risque d’infection aiguë par le VIH et son test d’anticorps anti-VIH était négatif. L’infection aiguë par le VIH se présente comme une mononucléose infectieuse. Bien que sa présentation ne soit pas typique d’une infection aiguë par le VIH, nous avons tout de même envisagé cette possibilité.

En raison de sa présentation sévère, nous avons réalisé un scanner de sa gorge. Ce scanner a révélé une amygdalite sévère, mais n’a montré aucun signe d’abcès péri-amygdalien ou de syndrome de Lemierre.5

La culture de gorge a permis de poser le diagnostic. Le streptocoque bêta-hémolytique du groupe C est une cause moins fréquente de pharyngite aiguë, mais il a à la fois une microbiologie et une présentation similaires à celles des streptocoques bêta-hémolytiques du groupe A. Les deux causent des pharyngites et des cellulites exsudatives isolées ou épidémiques de source commune, qui sont indiscernables cliniquement. Certaines souches de streptocoques du groupe C contiennent également des fibrinolysines et des streptolysines, qui peuvent stimuler les titres d’ASO.

Plusieurs études ont démontré que les streptocoques du groupe C sont une cause relativement fréquente de pharyngite aiguë chez les étudiants des collèges et chez les jeunes adultes qui consultent aux urgences.6,7 Le diagnostic de streptocoque du groupe C doit être envisagé chez un patient dont le test de détection rapide de l’antigène est négatif et dont l’évolution clinique s’aggrave. Bien qu’il ne soit pas aussi fréquent que la pharyngite à streptocoques du groupe C, le groupe G peut avoir une présentation similaire.8

Bien que le streptocoque du groupe C ait une prévalence de moins de 5 % chez les patients adultes atteints de pharyngite,9 il peut provoquer une pharyngite grave. Ce patient a démontré une présentation extrême de pharyngite progressive du groupe C.

Les stratégies actuelles de dépistage des patients adultes atteints de pharyngite passeront à côté de ces causes inhabituelles de pharyngite grave. Lorsque le patient présente une pharyngite qui s’aggrave, nous devons alors envisager un diagnostic différentiel élargi. Nous suggérons que les patients dont la pharyngite s’aggrave fassent l’objet d’une culture de gorge (et non d’un second test rapide) afin de rechercher les streptocoques bêta-hémolytiques du groupe A et les autres. Si l’examen physique suggère la possibilité d’un abcès ou d’une thrombophlébite suppurée, il faut alors obtenir un scanner de la gorge. Enfin, il faut envisager la possibilité d’une mononucléose infectieuse10,11 et faire les tests appropriés.

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