Le pape François a créé une nouvelle catégorie pour la béatification, le niveau immédiatement inférieur à la sainteté, dans l’Église catholique : ceux qui donnent leur vie pour les autres. Cela s’appelle « oblatio vitae », « l’offre de la vie » pour le bien-être d’une autre personne.

Les martyrs, une catégorie spéciale de saints, offrent aussi leur vie, mais ils le font pour leur « foi chrétienne ». Et donc, la décision du pape soulève la question : La compréhension catholique de la sainteté est-elle en train de changer ?

Qui est un « saint » ?

La plupart des gens utilisent le mot « saint » pour désigner une personne exceptionnellement bonne ou « sainte ». Dans l’Église catholique, cependant, un « saint » a un sens plus spécifique : quelqu’un qui a mené une vie de « vertu héroïque. »

Cette définition inclut les quatre vertus « cardinales » : prudence, tempérance, force d’âme et justice ; ainsi que les vertus « théologales » : foi, espérance et charité. Un saint manifeste ces qualités de manière constante et exceptionnelle.

Giuseppe Gabriele Del Rosario Brochero avant le début d’une messe de canonisation. Gregorio Borgia/AP

Lorsqu’une personne est proclamée sainte par le pape – ce qui ne peut se produire qu’après la mort – la dévotion publique au saint, appelée « cultus », est autorisée pour les catholiques du monde entier.

Canonisation

Le processus pour être nommé saint dans l’Église catholique est appelé « canonisation », le mot « canon » signifiant une liste faisant autorité. Les personnes qui sont nommées « saints » sont répertoriées dans le « canon » en tant que saints et reçoivent un jour spécial, appelé « fête », dans le calendrier catholique.

Avant l’an 1000 environ, les saints étaient nommés par l’évêque local. Par exemple, saint Pierre l’apôtre et saint Patrick d’Irlande étaient considérés comme des « saints » bien avant que des procédures formelles aient été établies. Mais à mesure que la papauté a accru son pouvoir, elle a revendiqué l’autorité exclusive de nommer un saint.

L’enquête

Aujourd’hui, la canonisation comporte quatre étapes.

Tout catholique ou groupe de catholiques peut demander à l’évêque d’ouvrir un dossier. Ils devront nommer un intermédiaire officiel, appelé le « postulateur », qui fera valoir la cause du saint. À ce stade, le candidat est appelé « serviteur de Dieu ».

Une enquête formelle examine la vie du « serviteur de Dieu ». Ceux qui ont connu le candidat sont interrogés, et les déclarations sous serment pour et contre le candidat sont examinées. De même, les écrits du candidat – s’il en existe – sont examinés pour vérifier leur cohérence avec la doctrine catholique. Un « promoteur de justice » nommé par l’évêque local s’assure que les procédures appropriées sont suivies et un notaire certifie la documentation.

Les actes de l’enquête, appelés « Acta » ou « Les Actes », sont transmis à la Congrégation pour les causes des saints à Rome. La Congrégation pour les causes des saints est grande, avec un préfet, un secrétaire, un sous-secrétaire et un personnel de 23 personnes. Il y a également plus de 30 cardinaux et évêques associés au travail de la congrégation à différents stades.

La Congrégation pour les causes des saints nomme un « relateur » (l’un des cinq qui travaillent actuellement pour la congrégation) qui supervise le postulateur dans la rédaction d’un document de position appelé « positio ». La positio défend les vertus du serviteur de Dieu et peut faire des milliers de pages. La congrégation examine la positio et les membres votent « oui » ou « non » à la cause. Les votes « oui » doivent être unanimes.

La décision finale revient au pape. Lorsqu’il signe un « décret de vertu héroïque », la personne devient « vénérable ». Il reste alors deux étapes : la béatification et la sainteté.

Pendant la majeure partie de l’histoire catholique, le processus de canonisation était rigoureux. L’un des personnages clés de l’enquête au Vatican était « l’avocat du diable », qui fonctionnait comme un avocat adverse en contestant la sainteté du candidat. C’est l’origine de l’expression anglaise souvent utilisée faisant référence à quelqu’un qui prend position pour défier une autre personne afin de prouver un point de manière plus complète.

Peu de personnes ont reçu le titre de « saint », bien qu’il y en ait plus de 10 000 que l’Église catholique vénère. Même le célèbre écrivain spirituel du 15e siècle, l’Allemand Thomas à Kempis, n’a pas réussi à franchir le cap. Son corps a été exhumé et examiné lors de sa demande de sainteté. On raconte qu’il y avait des marques de griffures à l’intérieur de son cercueil et des éclats de bois sous ses ongles. Ces découvertes suggèrent une tentative d’évasion après avoir été enterré vivant. Le problème aurait été que Thomas à Kempis n’a pas accepté paisiblement la mort comme un saint devrait le faire. Son cas n’a pas avancé.

Changements dans le processus

Au début des années 70, le pape Paul VI a révisé le canon des saints pour exclure ceux dont l’existence historique ne pouvait être vérifiée. Par exemple, saint Christophe, le protecteur des voyageurs, a été supprimé, bien que de nombreux catholiques aient encore une médaille de saint Christophe dans leur automobile.

Le reliquaire en verre contenant le sang de feu le pape Jean-Paul II. Stefano Rellandini/Reuters

En 1983, Jean-Paul II, qui deviendra lui-même un saint, fait passer la période d’attente de 50 à cinq ans après la mort du candidat. Il a également réduit le rôle de « l’avocat du diable ».

Ces changements ont suscité des critiques selon lesquelles le Vatican était devenu « une fabrique de saints ». Ce processus plus rapide n’a toutefois pas réduit les coûts à six chiffres nécessaires aux partisans de la cause pour financer une enquête et engager un postulateur.

Types de saints

Si le titre de « saint » est utilisé pour tous ceux qui sont canonisés, il existe différentes catégories de saints, comme « martyr » et « confesseur ».

Un « martyr » a été tué pour ses croyances chrétiennes ; un « confesseur » a été torturé ou persécuté pour sa foi, mais pas tué. Si un saint avait été un évêque, une veuve ou une vierge, cela fait également partie de son titre.

Par exemple, saint Blaise est à la fois un évêque et un martyr. Katherine Drexel, de Philadelphie, porte le titre de « sainte Katherine Drexel, vierge ». Sainte Katherine Drexel était la deuxième sainte née aux États-Unis et fondatrice de l’université Xavier de Louisiane, la seule université catholique américaine établie principalement pour les Afro-Américains.

À ce stade, il n’est pas clair si un titre spécial est associé à la nouvelle catégorie de saint déclarée par le pape François.

Miracles et martyrs

Les miracles sont une partie importante de la canonisation.

Un miracle est un événement qui ne peut être expliqué par la raison ou par des causes naturelles. Pour être nommé « bienheureux », il faut prouver qu’un miracle a eu lieu sous l’influence du candidat à la sainteté. Le processus commence par la prière d’une personne auprès du saint qui « intercède » auprès de Dieu, généralement pour guérir une maladie. Le miracle potentiel est ensuite examiné par une commission médicale composée de neuf membres, qui ont juré de garder le secret. Ils ne peuvent être payés pour leur travail que par virement bancaire, une règle visant à empêcher les paiements au noir qui pourraient corrompre le processus.

Après que la survenue d’un deuxième miracle soit établie, le titre du candidat passe de « bienheureux » à « saint ». Avec saint Jean-Paul II, cela s’est produit dans le temps record de neuf ans. Il y a d’abord eu la guérison d’une religieuse française atteinte de la maladie de Parkinson. Puis, il y eut la guérison d’une Costaricaine d’un anévrisme cérébral.

Les martyrs ont un chemin différent vers la sainteté. Ils deviennent « bénis » lorsque le pape fait un « décret de martyre ». Après un seul miracle, les martyrs sont « élevés à la gloire des autels », une expression qui fait référence à la cérémonie publique au cours de laquelle une personne est officiellement nommée saint.

Un nouveau type de saint ?

Compte tenu de cette histoire complexe de la sainteté catholique, il est juste de se demander si le pape François fait quelque chose de nouveau.

La déclaration du pape indique clairement que quelqu’un qui donne sa vie pour les autres doit faire preuve de vertu « au moins comme il est ordinairement possible » tout au long de sa vie. Cela signifie que quelqu’un peut devenir « béni » non seulement en menant une vie de vertu héroïque, mais aussi en accomplissant un seul acte héroïque de sacrifice.

Cet héroïsme peut consister à mourir en essayant de sauver une personne qui se noie ou à perdre la vie en tentant de sauver une famille d’un immeuble en feu. Un seul miracle, après la mort, est encore nécessaire pour la béatification. Maintenant, les saints peuvent être des personnes qui mènent une vie assez ordinaire jusqu’à un moment extraordinaire d’abnégation suprême.

De mon point de vue de spécialiste catholique des religions, il s’agit d’un élargissement de la compréhension catholique de la sainteté, et d’un pas de plus vers le pape François qui rend la papauté et l’Église catholique plus pertinentes pour les expériences des catholiques ordinaires.

La béatification d’un saint n’est qu’une étape.

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